Oh le vilain mot : spéculateur !

Et pourtant  !

La spéculation se distingue de l’investissement selon un critère simple, indépendant de la durée de portage.
Dans la spéculation, nous avons un objectif de rendement ou d’appréciation du capital.
Dans l’investissement, nous avons en plus un usage du placement (notion qui prend plusieurs sens : par exemple poste lié au placement ou participation à la gestion, utilisation de l’actif, lien sentimental, etc..)
En bref, dans une spéculation, on recherche un gain purement financier, dans un investissement on interagit avec l’actif.

Pour illustrer, si j’achète un tableau que je mets au coffre en espérant que son auteur sera bientôt célèbre, je spécule. Si je l’accroche à mon mur pour le regarder, j’ai investi.

C’est exactement la même chose pour un placement financier.

On peut porter un titre pendant trente ans en en attendant un rendement et une appréciation en capital, on en est pas moins un spéculateur, par contre, si l’on conseille le PDG, si l’on bosse dans la boite en question, si l’on a mis son capital dans sa propre boite, là on investit.

Nous pouvons noter que la notion de risque est également indépendante du statut de spéculation ou d’investissement.

J’investis dans une startup, je prend un risque certain, je spécule sur les obligations françaises, mon risque est bien moindre, même si pas nul.

Pour la petite (grande) histoire, l’investissement est une pratique plutôt récente (fin XIXe), dans la Venise ancienne, par exemple, les marchands qui frettaient des navires pour aller chercher de la soie en orient spéculaient purement.

La plupart des épargnants sont donc les Monsieur Jourdain de la spéculation, n’ayant aucune attache avec leur placement.

La spéculation professionnelle s’exprime par exemple et particulièrement dans les gestions dites “quantitatives” ou “indicielles”. Là, aucune interaction avec les actifs.

Le mot “spéculateur” est entaché. Mauvaise réputation et tout. Il semble que cela provienne d’une confusion avec les notions de délit d’initié et de manipulation de marché. Pourtant, cela n’a rien à voir !

Vilain spéculateur

Nos simples placements en épargne retraite sont de la spéculation (Dans le sens pari sur l’avenir). Les délits d’initié et manipulations de marché en sont étrangères. Il faut se le souvenir, ces types d’agissements sont particulièrement surveillés et réprimandés pénalement : l’industrie des marchés financiers est l’une des plus réglementées qui soient ! Dans bien des cas, c’est la méconnaissance des mécanismes boursiers, de leurs règles qui laissent se propager de telles interprétations.

Il m’arrive d’ailleurs qu’un interlocuteur, tout outré de se découvrir spéculateur me dise “mais pas du tout, j’investis, car je me renseigne à fond sur mes placements”. Eh bien, heureusement qu’il se renseigne, spéculer n’est pas un pari fou ou irraisonné. Mais tant qu’il n’est pas acteur dans son placement, il n’en reste pas moins spéculateur !

La spéculation n’est d’ailleurs pas un mal en soi : sa première vertu est de participer à la liquidité des actifs, le spéculateur n’ayant pas d’attaches avec son placement, il en dispose très librement. Dans de nombreux cas, nous n’avons pas trop le temps, ni forcément de compétences pour être acteur dans le placement. Placer son argent avec un but de rendement ou d’appréciation du capital est naturel en soi.

Investir est plus impliquant.

Tout cela dit, vous et moi constatons que le besoin de sens à l’épargne et au placement émerge de plus en plus.

Je m’intéresse particulièrement à cet outil du renouveau de l’investissement qu’est le crowdinvesting.

Outil de relation entre particuliers et entreprises, cette évolution 2.0 du placement, par ses premiers succès et sa croissance malgré les freins réglementaires permet de redonner du sens à l’épargne.

De la même manière, une approche revisitée de la gestion d’OPCVM dans laquelle les souscripteurs choisiront l’axe de placement se rapprochera de la notion d’investissement. Au moins par l’implication émotionelle des souscripteurs – nous voyons depuis quelques années un début d’implication avec les OPCVM ISR (Investissement Socialement Responsable) par exemple.

Finalement, nous spéculerons toujours un petit peu (après tout, prendre des paris sur l’avenir est très humain), mais nous avons envie et désormais plus de moyens pour pouvoir investir. 🙂

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