La “Best execution” entraînant des coûts administratifs, autant aider nos clients à mettre en œuvre une “Good execution” et un process optimisé sans “pertes en ligne” : comme nous le verrons ici, les coûts de frottement liés à l’exécution ne viennent pas que du marché…

Le coût de transaction est composé de deux, voire trois composantes
– Frais : Courtages, commissions, taxes
– Impact de marché
– Éventuel coût d’opportunité

Les frais sont identifiés et discriminés. Ils sont partiellement l’objet de l’expression du pouvoir d’achat des sociétés de gestions qui , en concentrant leurs ordres, remplissent une fonction de centrale d’achats (Courtages- commissions).

La mesure de qualité en tant que telle ne porte donc pas sur les courtages et commissions, puisque c’est la partie du coût qui n’est pas une réserve de performance, mais bien la rémunération des valeurs ajoutées des autres composantes.

Les besoins s’étant tout d’abord exprimé aux USA, les instituts et méthodes utilisées sont fortement conditionnées par les contraintes des marchés Anglo-saxons :
– marché dirigé par les ordres,
– manque ou absence d’information sur la profondeur de marché,
– pratiques parasitant les données : possibilité de traiter sur plusieurs “exchanges” ou “venues”, « late posting » (possibilité de retarder l’annonce de la transaction)…

Certaines observations de ces méthodes sont intéressantes : analyse du »style de gestion » par Plexus par exemple, c’est-à-dire de la tendance au moment du passage de l’ordre. (Ce qui permet de distinguer l’ordre contrarien de l’ordre tendanciel).
Cela dit, les analyses les plus courantes actuellement restent primitives, ou entachées de vices de construction :
OHLC (OpenHighLowClose), c’est-à-dire cours median auquel on peut appliquer une martingale : garder une partie importante de l’ordre pour le dernier cours…
VWAP (Cours moyen pondéré) : ce n’est pas une mesure, l’exécution elle-même détermine de cours moyen pondéré, ce qui constitue un non sens mathématique.Et surtout cela n’indique rien : le VWAP étant censé représenter le marché, le réaliser équivaut à passer un ordre « a tout prix » sur un marché de fixing.
Pour utiliser une analogie, c’est comme si un régatier se contentait de suivre la direction du vent au lieu de la route de la régate ..
Ce “référentiel” n’en reste pas moins ardemment défendu par les opérateur manipulant de grosses quantités : comme ils définissent le sens du vent, ils se comparent à eux même.. cynique, mais pratique…

En réalité, l’impact de marché a deux dimensions, l’une absolue, l’autre relative.

— La dimension absolue est aussi appelée « slippage » par les gestions de fonds de futures.

Il s’agit tout simplement de la différence entre le cours du vecteur d’investissement qui a servi à la décision (On utilise souvent le « pre-trade » price, cours du marché au moment du passage de l’ordre) et le cours d’exécution proprement dit.
Mathématiquement et factuellement, cette différence va diminuer l’alpha recherché par le gérant dans sa décision stratégique (ou l’augmenter, mais moins souvent…). C’est l’impact de marché brut.

Si X est le cours au moment de la passation de l’ordre et Y est le cours d’exécution,
le slippage « s « est : s =Y – X

Pour illustration, si un gérant anticipe une performance de 10% de son investissement sur un titre valant 100 et que la table de négociation a exécuté l’ordre à 101 selon les contraintes du marché, l’anticipation d’alpha se réduit à 8%.. (Le coût de sortie pouvant être anticipé au même niveau que celui d’entrée)

— La dimension relative est la différence entre l’anticipation du coût de frottement et le « slippage » réellement constaté.

Ici, on anticipe, par calcul, le coût de frottement (statistiquement ou par extrapolation de la tendance) Soit dXIl y a trois «écoles » pour le calcul de dX :
– Comparaison avec des données historiques extraites d’une base de donnée d’exécutions réalisées,
– Formule basée sur analyse de liquidité et de volatilité,
– Extrapolation de la tendance passée sur une période équivalente à la durée théorique que devrait prendre l’exécution.

Pour un achat, la qualité d’exécution q sera : q = dX – s

Pour illustration, si l’on pense ex-ante que le coût de frottement de notre investissement ci-dessus sera 1% et que la table de négociation achète à 100.8, la contribution qualitative de l’exécution sera de 20 centimes.

Cette mesure est la seule mesure objective de qualité d’exécution.

Il est évident que sa validité ne pourra porter que sur l’analyse d’un échantillon relativement large de négociations.
La mesure étant relative, elle ne démontre pas la qualité d’une exécution isolée, mais bien d’une masse d’exécutions. La taille de l’échantillon réduisant les aléas de calculs individuels.

Pour l’instant, cette approche est peu utilisée et ne fait pas encore l’objet d’un consensus de marché pour les raisons suivantes :
– Bases de données incomplètes chez les utilisateurs (Il faut des fichiers complets, contenant toutes les caractéristiques de l’ordre, en particulier tous les horodatages afin de pouvoir réellement analyser l’ordre et ses contraintes)

– Formule d’évaluation ex-ante du coût de frottement encore imprécise et sujette à débat.

La diversité des modes de cotation (Marchés dirigés par les ordres/par les prix, le tout avec un niveau de transparence et de publicité non homogène..) et l’absence d’historique suffisamment documenté ainsi que les problèmes de calcul rencontrés par les instituts d’analyse (Puissance de calcul, prise en compte des contraintes) expliquent en partie le retard technique du marché par rapport aux volontés affichées de quantifier la qualité d’exécution.

On notera que certaines exécutions sont d’ores et déjà mesurable systématiquement : il s’agit des exécutions à contraintes, type rebalancement indiciel, changement d’indice de référence, et toute autre ordre de gestion purement passif : il est plus facile de mesurer l’impact sur la tracking que sur l’alpha !

marche content

— Cela dit les exécutions « passives » génèrent quelques « bruits » nécessitant une attention :

La gestion, est une prise de décision. Une prise de décision, c’est une différenciation par rapport à une situation neutre. La situation neutre, c’est le benchmark, son application systématique, c’est le fonds indiciel.
Pour qu’un gérant puisse dire qu’il gère, il faut qu’il puisse ne pas gérer. (Ne pas gérer c’est répliquer le benchmark, ne pas investir lors d’une souscription est par contre une DECISION).

Si le fonds utilise de mauvais prix pour faire face aux souscriptions/rachats (1), la performance du fonds va dévier du benchmark du montant de l’erreur de pricing multipliée par le flux net.
Si les investisseurs orchestrent leurs souscriptions/rachats parce qu’ils comprennent le sens de l’erreur de pricing, ou si les flux nets sont corrélés négativement avec l’erreur de pricing pour d’autres raisons(2), le fonds sous-performera son benchmark.

En (1), on voit une problématique affectant les fonds multi “time zone”
(Valorisation décalée par rapport aux mouvements du marché leader, marché US en principe : si la valorisation utilise la clôture du jour, et que le marché US a fortement baissé, la part japonaise n’a pas pris en compte cette baisse, et les rachats se font au dessus de la valeur à laquelle le gérant pourra sortir)
– et les fonds small caps
(Titres très illiquides, dont la cotation, donc les derniers cours représentatifs ne représentent pas la réalité du marché : si un titre ne cote pas depuis 2 jours, mais que le marché a baissé, on aura pas systématiquement forcé le cours, et un rachat se passera au dessus de la valeur réelle du portefeuille par exemple)

En (2), il s’agit du défaut de maîtrise de l’information de souscription/rachat par rapport au moment du calcul de la valorisation(a), et/ou calcul de la valorisation sur un cours de référence non réplicable (b)(essentiellement pour raisons de liquidité et essentiellement à cause de la passion française : le cours d’ouverture).
Dans le (a) défaut de maîtrise, la valorisation sera déjà passée quand le gérant aura l’information, classiquement il recevra des souscriptions dans un marché à tendance haussière, et aura donc une succession d’achat à réaliser AU DESSUS de la valeur de marché prise en compte dans la valorisation.
Dans (b) la non-réplication, la table ne pourra pas exécuter la totalité d’un ordre “neutre”, et donc le fonds devra subir du risque de marché pour tout ou partie d’un ordre réputé ne pas en supporter.

Il est donc besoin d’une procédure maîtrisée de souscriptions/rachat (cours inconnu), associé à l’utilisation d’un outil de tracking des titres qui ne cotent pas en rythme avec le marché (Et la mise systématique en action du comité de calcul de “fair value” dans les cas repérés)
Comme il restera cependant une partie de risque de liquidité sur le marché :
Il faut contrôler des frais d’entrée/sortie : ceux ci constituent la prime d’assurance du gérant, il suffit de calculer la valeur de cette prime (comme on calcule la valeur d’une option).

On voit que l’impact d’exécution peut dépasser la simple transaction.

C’est d’ailleurs pour cela que l’évolution des tables de négociation buy-side les amène à être un pôle tactique à part entière dont les préoccupations dépassent le marché et prennent une dimension transversale dans la société de gestion.

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